Pages

jeudi 10 décembre 2009

Balle qui roule me fout les boules...

J'ai une diabolique horreur des ballons. Vous l'ai-je jamais dis? Bon, c'est pas facile à avouer, hein, surtout quand toute la terre a tendance à tourner autour de ces petites choses globulaires. Mais le temps est venu de faire mon coming out (non pas celui où tu avoues que tu aimes les boules, celui où je confesse que je hais les balles - dans le dico, mon dico, ça s'appelle avoir les boules, ou la playballsphoby).

Il y a des enfants qui ont la phobie des ballons de baudruche, parce que ça éclate. J'leur accorde que la texture est pas non plus terrible, on a l'impression de tripoter des couilles d'éléphanteau nouveau-né, et quand ils s'envolent accrochés à un fil, ça doit leur rappeler la dure et récente époque de la chasse à l'ovule (un cauchemar quand on y repense...). Sur ce site et surtout sur celui-là, je vois même que certains, les "looners", en ont fait un fantasme ("oh, oui, vas-y bébé, éclate-moi le ballon!").

Batball

Mais j'vous arrête. Suis pas dans le métier. Pour moi, je parle des vrais ballons, les plus féroces, ceux qu'ont pas une tête de spermatozoïde mais ceux qui sont ronds, les plus sphériques, genre globe du pouvoir, objet diabolique! J'en vois défiler des centaines comme ça, parce que j'ai la chance (sadique) de crécher dans une tour qui surplombe un terrain de foot. J'les vois bien les mecs, courir soir après soir derrière leur satané ballon rond, et au bout d'un an et demi, il se sont toujours pas mis d'accord à son sujet. C'est que le globe de pouvoir déclenche bien des envies. Ils se le passent à tour de rôle, dans un mime de démocratie, mais au fond, ils le veulent tous, ils le pourchassent. Vu sous cet angle, j'aurais presque de la peine pour ces pauvres ballons. Si j'pouvais, j'fonderais une association qui se chargerait d'enlever tous les ballons et de les emmener loin du monde des hommes. Mais j'hésite pour l'avenir : est-ce qu'on leur offre une île rien qu'à eux pour reproduire l'espèce en toute sécurité, ou est-ce qu'on ouvre un charnier et qu'on les dégonfle tous un par un à coup d'râteau infecté au tétanos avant de les jeter dedans? histoire d'être sûr que justement, ils ne se reproduisent pas (on devrait penser à ça pour d'autres boules aussi, mais c'est hors sujet). Le problème de l'île, c'est que j'aurais peur de recréer Jurassic Park et de voir un jour débarquer un Addidas Rex dans Los Angeles. Mais le coup de l'extermination, c'est pas non plus très bon d'un point de vue médiatique et ça demande beaucoup de moyens (faut s'payer des râteaux et ça les hommes ils aiment pô).

En attendant, moi, faut que j'me les coltine les ballons ronds. Saloperies de ballons ronds. J'ai l'impression qu'ils ont des yeux et qu'ils me regardent, même de loin quand des gosses jouent avec dans la rue, dans l'espoir sans doute que ça leur ouvre les secrets de l'univers. C'est pervers un ballon rond. Toutes les races de ballons : les ballons de foot typiques, genre carrelage de cuisine, sont de vrais enfoirés ; les ballons de basket, j'respecte, parce que j'en ai eu un... ah oui, sauf que depuis la fois où il a voulu faire joujou avec mes sphères à moi, je ne veux plus lui parler. Et les ballons de volley? T'as beau les envoyer de l'autre côté du filet, au prix d'incroyables contorsions des bras qui te font bouger comme Guignol qui applaudit, ce connard synthétique te revient toujours en visant la tête! Y a qu'au rugby, j'dirais qu'ils ont été intelligents (oui, je sais en vrai le mec avait pris son ptit déj' au ptit ricard, dans un verre... ballon, ahah!) : le ballon a la même vie, mais il n'est pas rond. Paraît que c'est rapport à l'a-é-ro-dynamisme... Moi j'ai ma petite idée : c'est le seul qui rentre vraiment.

Un homme qui en a une paire, une vraie.

Revenons à notre globe-trottinage. Les ballons, quoi qu'on en dise, sont des petits diables pervers en matières synthétiques qui aiment se faire fourrer, souffler et qui kiffent les passes. Mais surtout, ils sentent quand on les aime pas, et c'est là qu'est mon problème. C'est pire qu'un chat le ballon. Ca voit venir l'ennemi et ça charge par derrière, quand tu t'y attends pas, généralement à la tête ou entre les jambes. Je l'ai dit, ils me regardent quand je passe dans la rue. Ca s'la pète un ballon. Et surtout, ça rebondit! Ca va jamais où tu veux qu'ça aille. Ca roule ces conneries là. Ca sautille, ca... Aaaarghhh! Non pas ça! Quand j'en vois un qui me fonce dessus, tout bondissant-roulant-boulant, c'est tout un passif de tensions, d'agressions, d'humiliations qui me remonte du fin-fond de ma saleté de période trans-pubère. Tenez, l'autre jour, en rentrant chez moi, après être sorti me galérer dans le quartier pour retirer quelques sous survivants et les dépenser en énergie vitale pour me faire survivre moi-même, v'là-t-y pas que j'tombe sur un trio infernal de mioches trans-pubères qui occupait le passage genre triangle des Bermudes avec leur damnerie de ballon rond... Vous remarquerez, ils font toujours ça dans le passage, parce qu'ils sont de mèche avec le ballon et que le ballon veut tous nous attirer dans son monde de torture et d'abjection où les hommes se retrouvent avec une aiguille dans le bouchon et gonflés à coup d'hélium (j'vous aurais prévenus, ils sont venus pour nous détruire!!!!).

Bref, le ballon est là, orbe du diable qui fait boing-prprprprpr-boing en dessinant le parfait triangle des bouches de l'enfer. Je le reconnais, je l'ai déjà vu, coincé dans la haie merdique du rez-de-chaussé (où la gardienne a accroché depuis peu une de ces atroces guirlandes lumineuses évadées de Las Vegas qui clignotent toute la nuit comme si elles étaient dans leur période des amours et parce qu'elles emmerdent les ours blancs de la banquise - ça aussi je déteste, je les hais, je les maudits, foutues déco de beauf de noël!). Il est moche, blanc sale rayé caca d'oie. Mais c'est ce qui le rend si hargneux.

Donc, je rentre. Je vois les gosses, je vois le ballon... J'ai fait un remake de Dead like me, malgré moi : "Oh, chiotte!". Là, j'suis repéré. Juste comme j'approche, le ballon qui décrivait de parfaites lignes droites depuis le début se met à partir en pelote : il quitte le champ de force pubertaire et me fonce dessus à toute berzingue. Heureusement que ça crie pas, parce que j'me pisserais dessus. Que faire? Courir en arrière les bras au-dessus de la tête en hurlant "Mamaaaaaaan!" ou faire face? J'ai fait face (hey, j'suis mouillé mais j'suis pas ta poule!). J'ai ralenti sa course en freinant du pied. J'l'ai envoyé vers les gosses. Il est allé sous la voiture.

"Et merde."

Là, le plan B : sauve ta dignité. Ca j'sais faire. J'aurais pu m'arrêter et lui gueuler dessus à ce connard de ballon : "Fuck you ball! Suck mines! Gonfleur à piston!" Puis j'lui aurais craché et tenté de l'écraser. Mais j'ai déjà essayé, ça s'écrase par un ballon, ça roule. Donc, j'ai pris ma dignité par la peau des fesses et j'suis passé la tête haute à travers le triangle des Bermudes, pour dire j'suis qu'une moitié d'pédale alors faisez gaffe!

[Testicules de girafe atteinte des oreillons ou suppôts de Satan?]

En même temps, j'm'en fous, parce que dans l'histoire, c'est pas moi qui ait pris un coup de pied. C'est le ballon.

Parce que, poétiquement, un ballon, c'est con. Et tout ce qui tourne autour. Y compris ce post.